Les Carnets du sous-sol est un roman en deux parties (Le sous-sol et Sur la neige mouillée) publié en 1864, qui, sous la forme d’un journal intime, nous fait entendre le récit d’un homme de quarante ans, vivant à Saint-Pétersbourg, malade du foie depuis une vingtaine d’années, ancien fonctionnaire retraité vivant d’un petit héritage après avoir démissionné et qui s’est réfugié dans son sous-sol pour y rendre compte de sa conscience aiguë du monde et des hommes.
Au diable les deux fois deux font quatre, ricane l’antihéros du Sous-sol, vivent les deux fois deux font cinq ! Au diable la science et ses diktats, le socialisme et les palais de cristal qu’il nous prépare, puisque seule m’importe ma liberté, plutôt mon libre arbitre, mon désir, mon vouloir et ma souffrance-volupté. In. De l’esprit du nihilisme chez Dostoïevski par Jacques Catteau

Un acteur talentueux.
Les Carnets du sous-sol
Je suis un homme malade… Je suis un homme méchant. Un homme repoussoir, voilà ce que je suis. Je crois que j’ai quelque chose au foie. De toute façon, ma maladie, je n’y comprends rien, j’ignore au juste ce qui me fait mal. Je ne me soigne pas, je ne me suis jamais soigné, même si je respecte la médecine et les docteurs. En plus, je suis superstitieux comme ce n’est pas permis ; enfin, assez pour respecter la médecine. (Je suis suffisamment instruit pour ne pas être superstitieux, mais je suis superstitieux.) Oui, c’est par méchanceté que je ne me soigne pas. Ça, messieurs, je parie que c’est une chose que vous ne comprenez pas.

Une pièce qui vous prend aux tripes.
Le spectacle
Le spectacle se concentre uniquement sur la première partie qui donne à entendre, au présent, la voix du héros qui a choisi de se prendre comme matière d’observation, de questionner sa pensée. Pour ce faire, il établit un dialogue avec des messieurs imaginaires, afin de créer une pensée contradictoire propre à toute véritable dialectique, à toute démarche philosophique. Ce procédé permet à Dostoïevski de revenir sur des idées reconnues par les penseurs de son époque comme des vérités absolues avec lesquelles il est en total désaccord. À savoir la suprématie de la raison sur la volonté, l’absence d’un véritable libre-arbitre… Le héros oppose à ces certitudes son désir qu’il nomme son « caprice » et qui est, selon lui, constitutif de l’homme au point que ce dernier préférera devenir fou plutôt que renoncer à sa liberté fondamentale quitte à ce que celle-ci l’amène à désirer l’irraisonnable.

Des moments émouvants.
Des oeuvres qui collent à sa vie personnelle
Avant Crime et Châtiment , avant Le Joueur, L’Idiot, Les Démons ou encore Les Frères Karamazov, qui assureront un à un sa postérité, Dostoïevski a écrit une oeuvre singulière, différente des grands romans qui lui succèdent par son format même, mais qui met déjà en place quelques-unes de leurs problématiques majeures. Les Carnets du sous-sol paraissent en 1864, juste après Souvenirs de la maison morte, et donc peu après le retour de l’auteur du bagne, qui l’a profondément marqué. Sa femme est alors mourante, et il vient de perdre son frère et son meilleur ami.

Le public est sous le charme.
Fédor Mikhaïlovitch Dostoïevski
Des souffrances indélébiles
Il est né à Moscou et a vécu de 1821 à 1881. Il a une enfance maladive, une jeunesse difficile, des études réduites à une instruction primaire. Très jeune, il connaît des traumatismes insurmontables : il voit sa mère souffrir dans la résignation et son père tué violemment. Quand à 23 ans (en 1844), il publie son premier ouvrage loué par la critique, Les Pauvres gens, Bielinski s’écrie : « Un nouveau Gogolnous est né ! ». Mais Dostoïevski est impliqué dans la conspiration de Pétrachevski, arrêté et condamné à mort. Sa peine est commuée en exil. Quatre ans en Sibérie, « seulement » quatre ans grâce au tsar Alexandre III qui amnistie les condamnés politiques. Il revient diminué physiquement et moralement de ces travaux forcés : crises d’épilepsie, besoin de solitude et caractère farouche.

Moments intenses.
Un mariage raté et un second réussi
Il épouse en 1861 une veuve, Mme Issaïew. Cette femme dépensière et le fils qu’elle a de son premier mariage ne le rendent pas heureux. De plus, il est lui-même un joueur incorrigible qui sollicite des avances à ses éditeurs. À la mort de sa femme, il se remarie avec une jeune fille, Anna Snitkiva, qui lui sert de secrétaire, véritable collaboratrice de son oeuvre, et qui, après sa mort, publiera une partie de sa correspondance. Pendant quatre ans, Dostoïevski voyage, puis vit à Berlin, Varsovie, Paris.
Une reconnaissance presque posthume
Son oeuvre tourmentée, hantée par la recherche de l’authenticité, est à la fois un tableau réaliste du monde et une somme universelle et prophétique de l’âme humaine. Tant dans sa vie que dans son travail d’écriture, Dostoïevski a été aux prises avec une profonde inquiétude métaphysique, et habité par une foi ardente dans le Christ et le peuple russe. Sa carrière n’a cessé d’osciller entre exaltation et désillusion, et ce n’est que très tardivement qu’il a été reconnu. Quand il meurt, en janvier 1881, à Saint-Pétersbourg, toute la population assiste à ses obsèques.

Quand la douleur s’exprime.
Infos pratiques
Les Carnets du sous-sol de Fédor Dostoïevski
Théâtre Essaïon
6 rue Pierre au Lard
75004 Paris
Jusqu’au 20 Janvier 2026
Lundi et Mardi à 21 heures.
https://essaion-theatre.com
www.theatredepaille.com
Crédit Photos : Clément Soyer
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