A 23 ans, Nadia prend la décision controversée de se retirer de la natation professionnelle et de s’affranchir d’une vie de sacrifices. Après une dernière course, les excès cachés du Village olympique offrent à Nadia un nouveau souffle de liberté. Toutefois, à mesure qu’elle plonge dans l’inconnu, les doutes surgissent. Elle se demande qui elle est réellement ?
Pascal Plante : Pourquoi Nadia Butterfly ?
Je voulais faire une incursion sociologique dans l’envers du décor olympique. Proposer un point de vue différent de celui capté tous les quatre ans par les caméras de retransmission. Les Jeux Olympiques, c’est un peu le Las Vegas du sport. Les médias nous montre le bel aspect de ces jeux glamour et policé. Or, la réalité est bien différente car ce milieu est loin du conte de fée. Je voulais capter tout ce que les caméras officielles ne regardent pas.
Avez-vous été un nageur de haut niveau ?
Pendant longtemps, la natation a tenu une grande place dans ma vie. 19 ans, quand j’ai passé les essais olympiques pour les Jeux de Pékin 2008, je devais être dans le top 15 des nageurs canadiens. Pour les Jeux Olympiques, ils prennent les deux meilleurs. Si j’avais voulu faire des compétitions internationales, il m’aurait fallu passer à un niveau supérieur et me dévouer entièrement à la natation. Or, je me trouvais à un âge où l’on se cherche pour trouver ce que l’on veut devenir. Se lancer dans une carrière vouée à se terminer à 30 ans est un gros pari. A l’époque, j’avais déjà d’autres centres d’intérêts. Parmi les autres nageurs, j’étais l’artiste, le cinéphile.
Pourquoi avoir mis votre expérience sportive au service d’un film ?
Le film « Les Faux Tatouages » que j’ai tourné en 2016 a eu une très belle vie en festival. Le fait d’être allé à la Berlinale m’a permis d’avoir les moyens financier de tourner Nadia, Butterfl . Ma productrice, Dominique Dussault, a été une alliée en or. Elle s’est impliquée dans chacune des étapes, je ne la remercierai jamais assez. Sans la pandémie, le film aurait vu le jour l’année dernière.
Comment s’est déroulé le tournage au Japon ?
Nous avons tourné seize jour à Montréal et quatre jours à Tokyo. La ville de Tokyo s’est imposée car les Jeux Olympiques devaient s’y dérouler. Nous avons fait en sorte de filmer la ville comme un touriste tout en restant authentique.
Dans Nadia Butterfly on ne ressent pas la caméra
Effectivement car j’utilise beaucoup de plans-séquences qui ne soient pas tape-à-l’oeil. Je tiens à être au plus près des personnages. D’ailleurs, dans cet esprit, la mise en scène de Nadia Butterfly est plus travaillés que celle minimalistes des Faux Tatouages. En fait, je conçois ces plans-séquences comme un moyen d’oublier la mise en scène et le réalisateur qui tire les ficelles.
La séquence de la compétition est époustouflante !
Ce résultat n’a pu être obtenu que grâce à l’implication des nageuses olympiques et à l’effort qu’elles on fourni. Je trouve regrettable que peu de films de sport mettent en scène un véritable effort physique. Les réalisateurs préfèrent recourir aux effets spéciaux. Notre pari a consisté à montrer cet effort physique ininterrompu pour créer une connexion émotionnelle avec la performance.
Cette scène fut-elle compliquée à tourner ?
La contrainte résidait dans le fait qu’il fallait la réussir dès la première prise. En effet, l’implication des nageuses était importante car elles se donnaient à 100%. De tels efforts sont rudes pour le corps. D’ailleurs, la caméra manœuvrée par Stéphanie Weber se trouvait sur une planche dans la piscine. Si le plan-séquence avait été raté, il aurait été impossible de le récupérer au montage. Pour que Katerine qui jouait Nadia ne s’épuise pas, nous avons eu recours à une doublure lors des répétitions. Cette approche un peu kamikaze de penser un plan vient de mon passé d’athlète.
La musique de Nadia Butterfly a un rôle introspectif et cathartique
Je suis mélancolique et la musique m’inspire. Pendant l’écriture du film, j’écoutais beaucoup Grouper, le projet de la musicienne Liz Harris. C’est une musique planante et éthérée. Elle a nourrit mon état d’esprit du moment. La musique m’inspire des images, des sensations, parfois même des bouts d’histoire. Elle revient en force dans le film. Le ton de Nadia, Butterfly se prêtait parfaitement au spleen. La chanson de Beach House qui clôt le film en est un peu la musique-totem : aérienne, introspective mais aussi très populaire.
Nadia Butterfly
Dans ce film, les entraînements, les étirements et les soins sonnent vrais. Le jargon du milieu n’a pas été édulcoré. Même la pression de Nadia se ressent face aux journalistes. Les nageurs subissent une réelle violence dans leur quotidien. Ils ont non stop un protocole à suivre, ils sont scrutés de toute part et doivent obéir aux ordres qu’on leur donne. Le pire, c’est quand un d’entre eux rate une performance. Les journalistes insistent sur cet échec et cela fait mal. Dans ce film la figure sacrée du sportif est humanisée. La vie des nageurs de haut niveau est axée sur la natation. Leur corps est leur outil de travail. Katerine Savard est fantastique dans le rôle de Nadia.
Les nageuses
J’ai rencontré Katerine Savard pendant la phase d’écriture car je la consultais pour gagner en véracité et en précision. Au fur et à mesure de nos entretiens, une évidence m’est apparue. J’en ai parlé à ma productrice. Au Québec, tout le monde la connaît. C’est un peu notre Laure Manaudou. Ariane Mainville, qui joue Marie-Pierre, est la meilleure amie de Katerine. Comme elles n’avaient jamais fait de cinéma, ça les rassurait de jouer ensemble. Hillary Caldwell a été médaillée olympique à Rio. Cailin McMurray est une nageuse de haut niveau basée à Montréal. Nous tenions à ce que les quatre relayeuses aient des contrastes. Il était primordial qu’elles aient des parcours différents et qu’elles soient même physiquement très différentes aussi.
Infos pratiques
Nadia Butterfly est un film de Pascal Plante. Sortie sur les écrans le 4 août 2021.
Crédits Photos : Ciné Sud Promotion
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