« Et pendant ce temps Simone veille » m’a fait passer un moment délirant. Je m’attendais à une pièce sérieuse compte tenu de la personnalité de Simone Veil. Et bien non ! Les quatre comédiennes qui jouent dans cette comédie nous racontent l’épopée des femmes sur quatre générations. Trois d’entre elles évoquent la vie quotidienne des femmes et une autre s’avère être la conférencière qui pointe du doigt les dates importantes qui ont changé leur vie. Attention, ça déménage !

Parfois, il ne faut pas grand-chose pour nous donner des idées. C’est ce qui est arrivée à l’auteur de cette comédie. En effet, elle fut prise d’une colère mémorable lors de l’affaire Strauss Kahn (2011) quand il a eu des rapports sexuels avec une femme de chambre aux USA. Les remarques qui ont fusé dans les médias l’ont prodigieusement énervée. Et principalement celle de Jean François Kahn « Ce n’est jamais que le troussage d’une femme de chambre » qui lui a fait vriller les tripes. Cet incident a fait prendre conscience à Trinidad que malgré tous les combats menés pour obtenir l’égalité Hommes/Femmes, les acquis sont toujours  très fragiles. Comme elle fait partie de l’une des dernières génération à s’être battue pour pouvoir choisir sa vie, elle a ressenti le besoin de faire savoir à quel point une telle égalité est importante.

Simone Veil, une femme admirable…

Une pièce formidable et tellement bien interprétée.

« Et pendant ce temps Simone veille »

Quoi de mieux que l’humour pour faire passer des messages ? Trinidad parle souvent de la place des femmes dans ses spectacles. Pour son Spectacle Et pendant ce temps Simone veille, nous allons suivre les pérégrinations de trois femmes assises sur un banc. Mieux, nous les découvrirons sur quatre générations. Pour que ce sujet sérieux qui traite des droits des femmes et les dates importantes qui s’y rapportent, Tridinad a ajouté de la musique. Mieux, elle a intégré des parodies comme Oui j’l’adore qui est devenue Oui Tchador…. Celle de Belle s’est transformée en Veil. Pour écrire ce spectacle, Trinidad s’est inspirée des femmes qui l’ont marquée tout au long de son existante. Une folle envie de leur rendre hommage s’est emparée d’elle.

Des images émouvantes.

Une rétrospective informative et intéressante.

Un spectacle féminin mais pas féministe

C’est ainsi qu’est né ce Spectacle qui tourne autour de 60 ans de féminisme. Son succès est tel qu’il est devenu culte. En effet, il est à l’affiche de la Comédie Bastille pour la huitième saison. Vite, entrons dans le vif du sujet. Nous voici le 26 novembre 1974. Simone Veil présente son projet de loi relatif à l’interruption volontaire de grossesse à l’Assemblée Nationale. Un ouragan souffle dans l’hémicycle. A peine remis de l’accord du droit de vote aux femmes obtenu en 1944, ces messieurs se rendent compte que la lutte pour les droits des Femmes ne s’est pas terminée. Simone Veil, ministre de la Santé sous Giscard d’Estaing dans le gouvernement Chirac, continue de lutter pour l’adoption de ce projet de loi. Il la fera passer à la postérité. Tout au long de cette comédie, vous revisiterez la lutte pour l’avortement, la PMA et le port du pantalon.

Une femme inoubliable.

Des profils diamétralement opposés

Marcelle représente la classe modeste, Giovanna la classe moyenne et France la bourgeoise. Suivront leurs filles, petits-filles et arrières petites-filles. A chaque période, elles se retrouvent entre copines. Ce qui leur permet de comparer leur vie de femme. Elles parlent de leur famille et échangent sur leurs désirs, leurs doutes, leurs espoirs et leurs faux pas. Ce parti pris de suivre des lignées familiales sous le regard de Simone, la « madame Loyal » est une vraie réussite. Ce qui est vraiment génial, c’est la dose d’auto-dérision, la pertinence, la tendresse dans l’écriture et le regard posé sur l’itinéraire intime de ces femmes. Toutes se débattent comme elles le peuvent dans leur époque respective. Les différents tableaux sont ponctués de chansons désopilantes. Ce qui donne un spectacle combinant avec bonheur drôlerie et clairvoyance. Un voyage de 1940 à 2016.

Des actrices formidables qui ont enflammé la salle.

Une mise en scène originale

C’est l’histoire de trois épouses et de leurs descendantes de 1940 à 2016 qui s’offre à nous. Ces quatre générations ébouriffent et dépoussièrent le passé. Des conditions de vie différentes, des aspirations différentes pour un même destin tracé par l’histoire et écrite par les hommes qui assujettissaient la femme. Irrésisitible, Simone, la narratrice, Bon chic bon genre, elle adore tomber la façade. Jamais elle ne se départit de sa bonne humeur. Avec ironie, elle pointe les éléments importants, les textes de loi, les ratés à l’allumage des politiques. Dans le même temps, elle contient les débordements des trois copines qui se disputent, et s’emberlificotent avec une drôlerie contagieuse.

Un triomphe bien mérité.

Un peu d’histoire

Jusqu’en 2013, nous étions souvent en infraction avec la loi. En effet, selon la loi du 26 brumaire de l’an X « Toute femme désirant s’habiller en homme doit se présenter à la préfecture de police pour en obtenir l’autorisation ». Cette interdiction fut partiellement levée par deux circulaires de 1892 et 1909. Elles autorisaient le port féminin du pantalon à condition que la femme tienne par la main un guidon de bicyclette ou les rênes d’un cheval… Il aura fallu attendre 2013 pour que cette loi soit abrogée. Toutefois, il faut savoir que dans certains pays, comme au Soudan, le port du pantalon par une femme est passible de coup de fouets… Horrible !

Les années 50 !

A cette époque, la libido était remplacée par le bonheur de posséder un robot ménager, un aspirateur et autres ustensiles pour la maison. Et les publicités fleurissaient sur les écrans de télévision et au cinéma. En effet, les femmes étaient majoritairement renvoyées à la sphère domestique et privée. Où bien à leur vie de couple et familiale, l’entretien de la maison, l’apparence et le corps. En effet, à cette époque, les femmes sont le plus souvent montrées à l’intérieur de la maison. Pour ce qui était de la vie extérieure, elles étaient décrites comme étant intéressées par le shopping, les cosmétiques, le prince charmant et les lessives efficaces. Cela tenait du faite que les hommes leur imputaient des responsabilités familiales et domestiques. Ces responsabilités se transforment même en devoirs auxquels il ne faudrait pas déroger.

Simone Veille

Les années 60 !

La femme est dévalorisée car une image lui colle à la peau : la cruche. Elle n’est bonne à rien à part cuisiner et s’occuper du foyer. Et qu’on ne parle pas de conduite, parce que là les publicitaires de l’époque se lâchent. La femme n’est pas douée, c’est comme ça. Heureusement, en mai 68, les femmes se battent battre pour disposer de leur corps et avoir des droits. Même les publicités évoluent. La publicité Smirnoff montre une femme libre et indépendante. La publicité pour les cigarettes Winston montre une femme heureuse, indépendante et supérieure aux hommes.

Une fin qui appelle une suite

Le spectacle se clôt en musique, sur un bel hommage à Simone Veil. Des images illustrant son parcours sont projetées sur un écran géant. Y compris quand elle défend la proposition de loi relative à l’IVG. En effet, cette pièce de théâtre laisse entrevoir des nouvelles perspectives pour l’Histoire du féminisme en général. Le féminisme est quelque chose de très vivant qui conquit de plus en plus le grand public.

Comédie Bastille

Infos pratiques

Et pendant ce temps Simone veille
Théâtre Comédie Bastille
5 rue Nicolas Appert
75011 Paris
01 48 07 52 07
https://comedie-bastille-billetterie.tickandlive.com
Jusqu’au 29 juin 2025

Photos Gaëlle Alban

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