Tromelin : L’île des esclaves oubliés par la Compagnie des Indes

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Tromelin : L’île des esclaves oubliés par la Compagnie des Indes

1363

Le 17 novembre 1760, un navire de la Compagnie française des Indes orientales quitte Bayonne. Le 31 juillet 1761, il s’échoue sur l’île de Sable  île de Tromelin. Cet îlot désert d’un km² est situé au large de Madagascar. Il transporte 160 esclaves malgaches achetés en fraude pour être vendus à l’île de France (Actuelle l’île Maurice). L’équipage regagne Madagascar sur une embarcation de fortune, laissant 80 esclaves sur l’île, avec la promesse de venir bientôt les rechercher. Ce n’est que quinze ans plus tard, le 29 novembre 1776, que Jacques Marie de Tromelin, commandant la corvette La Dauphine, jette l’ancre près de l’îlot et sauve les huit esclaves survivants : sept femmes et un enfant de huit mois. Une magnifique exposition au musée de l’homme retrace leur histoire.

Tromelin : Le contexte historique

Tromelin un naufragé

Illustration © S.Savoia, Collection Aire Libre, Dupuis -Crédit photo © JF Rebeyrotte

Aux XVIe et XVIIe siècle, le développement des échanges avec les colonies d’outre-Atlantique et des Indes orientales représente un enjeu majeur pour les puissances européennes. Elles investissent massivement dans la construction et l’armement de navires. En 1664, la France fonde en 1664, sur initiative de Colbert, la Compagnie française des Indes orientales. Cette association de négociants avait obtenu de Louis XIV le monopole du commerce entre la France et l’Asie.

Des conflits catastrophiques

Dessin Sylvain Savoia

Dessin Sylvain Savoia© Dupuis

Des violents conflits internationaux pour l’hégémonie sur les mers ne tardent à s’en suivre. Ils atteignant leur pic lors de la guerre des Sept Ans (1756-1763). Le royaume de France, l’Archiduché d’Autriche et leurs alliés s’opposent à la Grande-Bretagne et à la Prusse sur de nombreux théâtres d’opérations. L’Europe, l’Amérique du Nord,l’Inde font partie de cette bataille. C’est dans ce contexte mouvementé que l’Utile, un navire de la Compagnie des Indes, fait naufrage en 1760 avec sa cargaison de marchandises et d’esclaves sur l’île de Tromelin.

Tromelin : les chiffres

Dessin Sylvain Savoia © Dupuis

Dessin Sylvain Savoia © Dupuis

L’île et les naufragés

15 ans de survie
500 km : distance entre l’île de Tromelin et la première terre
1 km² : superficie de l’île
8 survivants dont 1 enfant sont sauvés en 1776

Déroulé de l’histoire

Dessin Sylvain Savoia © Dupuis

Dessin Sylvain Savoia © Dupuis

1760 1er mai
Le navire L’Utile quitte Bayonne, passe par l’Espagne, l’Île de France (île Maurice actuelle) puis Foulepointe à Madagascar dont il repart avec 160 esclaves à bord.
Le 31 juillet,  L’Utile fait naufrage sur l’île de Sable (île de Tromelin actuelle).
Le 27 septembre, l’équipage français quitte l’île de Sable à bord de La Providence, abandonnant 80 esclaves malgaches. Une embarcation de fortune rejoint Madagascar avec à son bord les autres esclaves.
Vers 1763, 18 naufragés quittent l’île sur un radeau .
En août 1775, une tentative de sauvetage échoue. Un des marins tombé d’un canot se retrouve parmi les naufragés.
Au mois de juillet 1776, le marin et 6 naufragés quittent l’île à bord d’un radeau. Parmis eux,les 3 derniers hommes de la communauté.

Objet retrouvé sur l'île de Tromelin © DACOI Jacques Kuyten

Objet retrouvé sur l’île de Tromelin © DACOI Jacques Kuyten

Le sauvetage 

Le 29 novembre 1776,  après 15 ans et 2 mois d’abandon, Jacques Marie de Tromelin recueille 7 femmes et 1 bébé de huit mois à bord de La Dauphine.
1848 voit l’abolition définitive de l’esclavage par la France.

Le développement de l’île et les expositions

1954 : construction d’une station météo et d’une piste d’aviation sur l’île.
Le 26 juin1960 : L’administration de l’île de Tromelin est placée sous l’autorité du préfet du département de La Réunion.
En 2005, le 3 janvier : L’administration de l’île de Tromelin est placée sous l’autorité du préfet administrateur  supérieur des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF).
2006, 2008, 2010 et 2013 : Missions archéologiques terrestre et sous‑marine par l’Inrap et le GRAN.
Le 24 avril 2013 : Pose d’une plaque commémorative sur le site archéologique par Victorin Lurel, alors ministre des Outre‑mer.
2015 : Première exposition au Château des Ducs de Bretagne/Musée d’histoire de Nantes puis début de l’itinérance.
2016 : Ouverture de la version Océan Indien de l’exposition Tromelin au musée Stella Matutina à la Réunion. 

Objet retrouvé sur l'île de Tromelin © DACOI Jacques Kuyten

Objet retrouvé sur l’île de Tromelin © DACOI Jacques Kuyten

Un texte universel

« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits » proclame le premier article de la Déclaration universelle des droits de l’Homme dont nous commémorons les soixante-dix ans.  Par son engagement, son discours, ses valeurs, le Musée de l’Homme célèbre ce texte universel et les droits humains fondamentaux qu’il énonce. Cette déclaration a été adoptée par la troisième assemblée générale des Nations Unies au Palais de Chaillot le 10 décembre 1948. 

L’exposition au musée de l’homme

Objet retrouvé sur l'île de Tromelin © DACOI Jacques Kuyten

Objet retrouvé sur l’île de Tromelin © DACOI Jacques Kuyten

Soixante-dix ans après la signature de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, le Musée de l’Homme met en oeuvre une programmation riche et variée pour affirmer ces valeurs communes. Durant six mois, de décembre 2018 à juin 2019, pour mieux interroger ce texte fondamental, la saison En Droit ! prend différentes formes : exposition du photographe Sebastião Salgado comme performances de Street Art illustrant plusieurs articles du texte de 1948, accrochage d’oeuvres d’art contemporaines emblématiques en lien avec la Déclaration universelle, table ronde sur les migrations, accrochages photographiques sur le thème des réfugiés et enfin l’exposition « Tromelin, l’île des esclaves oubliés » qui permet d’aborder notre passé colonial et l’histoire de l’esclavage.

Une exposition qui interpelle

Objet retrouvé sur l'île de Tromelin © DACOI Jacques Kuyten

Programmée dans le cadre de la saison En droits !, l’exposition « Tromelin, l’île des esclaves oubliés » interpelle le visiteur sur notre passé occidental, sur les limites de notre humanité. L’occasion de rappeler que l’article 4 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme « Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude; l’esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes » est aujourd’hui toujours d’actualité. Coproduite par le musée d’histoire de Nantes et l’Institut national de recherches archéologiques préventives, « Tromelin, l’île des esclaves oubliés » termine son itinérance au Musée de l’Homme, complétée par les découvertes récentes des chercheurs du Muséum national d’Histoire naturelle. Plus que jamais, le Musée de l’Homme, du haut de l’acropole du Trocadéro, entend porter loin son message humaniste et universaliste, celui de l’aventure humaine et des droits à la liberté et à l’égalité pour tous.

Musée de l’Homme

Cette exposition dure jusqu’au 3 juin 2019

www.museedelhomme.fr

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