Si l’on s’y prend bien, découvrir les principaux joyaux de ce royaume arabe en cinq jours et quatre nuits est possible. Un road trip que nous vous présentons en deux partie. Première étape : Jerash, Amman, Madaba, le mont Nebo et la mer Morte. En voiture !
Autant évacuer la question tout de suite : oui, la Jordanie est un pays sûr. Non, le conflit entre les Israéliens et le Hamas n’a pas débordé sur ce pays frontalier d’Israël. Certes, il y a des manifestations et des actions humanitaires de soutiens aux Palestiniens de Gaza. Comment pourrait-il en être autrement dans ce petit royaume où plus des deux tiers de la population est d’origine palestinienne ? Pour autant, rien qui ne doive inquiéter les touristes. L’hospitalité en Jordanie, l’accueil de l’étranger, sont un devoir sacré. A aucun moment, on ne se sent menacé ou simplement gêné. La police en uniforme ou en civil veille aussi au grain et les contrôles routiers sont réguliers. Maintenant, en route pour notre Road trip ! Pour ne pas perdre de temps dans les déplacements, mieux vaut louer une voiture avec chauffeur. La circulation en Jordanie est, disons… déroutante.
Une circulation anarchique
Car en Jordanie, on roule à droite, à gauche, souvent au milieu. Malgré les radars, on roule vite, on se croise. Les feux de signalisation semblent souvent être là pour le décor. Mais ça passe quasiment toujours… On peut aussi s’arrêter sur l’autoroute pour acheter fruits ou légumes à une des nombreuses camionnettes qui stationnent sur les bandes d’arrêts d’urgence. Plus on se rapproche d’Amman, la capitale jordanienne, plus la circulation est dense.
La ville au sept collines
On se rend aussi vite compte qu’Amman, loin d’être une capitale arabe poussiéreuse, est une ville moderne, avec de superbes immeubles magnifiquement éclairés la nuit, très étendue. A l’origine, Amman était édifié sur sept collines entre 700 et 1 100 m de haut. Ce qui a valu le surnom de « Rome du Moyen-Orient » à cette ville dont la fondation remonte à 7 500 ans. Ce qui en fait la cité habitée la plus ancienne du monde ! Aujourd’hui, Amman compte plus de quatre millions d’habitants, soit près d’un tiers des personnes vivant en Jordanie. Et s’étend désormais… sur une vingtaine de collines.
Jour 1, début du Road trip à Jerash
Le cadre de la sécurité et de la circulation posé, place au road trip. Avec, en ce premier jour de voyage et alors que l’avion vient juste de se poser, partons à la découverte de Jerash, à une cinquantaine de kilomètre d’Amman. Jerash est le deuxième site touristique le plus visité de Jordanie après Pétra. Chaque été, un grand festival d’art (concert, théâtre, danse) patronné par la reine Rania al-Abdallah est organisé dans ces ruines revenues à la vie. Ville antique disparue durant des siècles sous le sable, Jerash a été redécouvert en 1807 par un explorateur allemand, Ulrich Seltzen. Dégagée, restaurée à partir de 1965, en partie reconstituée, l’ancienne Gerasa (son nom antique) a presque retrouvé sa magnificence de l’époque romaine.
Alexandre et Hadrien
L’histoire de Jerash débute au Néolithique et se poursuit sous Alexandre le Grand. Cette ville connaît alors un fort développement. Sous les Romains, Jerash est incorporé au Décapole, un ensemble de dix cités du Levant. Point de passage des caravanes, Jerash atteint son apogée. Une richesse, une puissance qui se lisent encore dans les monuments hérités de cette période. Mais les temps ont changé. Des routes maritimes mettent à mal le système des caravanes, le christianisme s’impose, les temples païens cèdent la place aux églises byzantines. Puis, vient le temps des musulmans, des croisés. Jerash sombre dans l’oubli et se noie dans les sables.
Remonter le temps
Se promener dans Jerash, c’est prendre conscience de toute cette histoire. D’abord, on gare son véhicule sur un parking judicieusement aménagé. Puis, on traverse un souk de marchands de souvenirs. Enfin, on débouche sur le site. Et quel site ! L’arc d’Hadrien, édifié pour la venue de cet empereur romain en 129, accueille les visiteurs depuis près de deux mille ans. Reconstitué entre 2003 et 2008, il est de nouveau réellement imposant (25 m de large, 21 m de haut). Et superbe. Une fois cet arc franchi, on découvre un petit hippodrome capable cependant d’accueillir quelque 14 000 spectateurs. Fort de quatre tours et percés de sept portes, il a été édifié entre les Ier et IIe siècles de notre ère. Sous les Byzantins, il a servi aussi à abriter des ateliers de poteries et même une petite église.
Temple de Zeus et théâtre du Sud
Quelques pas et voici la porte du Sud qui perce la muraille ceinturant la ville et débouche sur le cardo maximus. Forte de 20 000 habitants à son apogée, Jerash est édifié selon le modèle classique des cités romaines. Deux grands axes la traversent : du nord au sud, le cardo maximus, 800 mètres de long, bordé de 200 colonnes, et le decumanus d’est en ouest. A gauche en remontant le cardo, le temple de Zeus, un ensemble monumental, édifié en partie sur une voute en berceau. Trois colonnes datant du IIe siècle se dressent toujours fièrement. Derrière le temple, le théâtre du Sud (Jerash compte aussi un théâtre du Nord) édifié à la fin du Ier siècle était consacré au dieu du vin et de la vigne, Dionysos. La scène tournée vers le sud permettait aux 5 000 spectateurs de ne pas être éblouis par le soleil.
Forum ovale et cardo maximus
Au pied de l’ensemble du temple de Zeus, se dressent les vestiges du forum ovale. Sans doute un des plus importants du monde romain. Bordé de colonnes qui ont été redressées, il servait jadis de place publique et de marché avec de nombreuses boutiques. Il permettait aussi la jonction du cardo maximus avec la porte Sud et le temple de Zeus. A la jonction du cardo et des decumani, se dressent deux tétrapyles, littéralement quatre portes, qui marquaient les croisements importants dans les villes de l’est de l’Empire romain. Vers le sud, le tétrapyle était composé de quatre « colonnes » cubique que l’on devine encore. Vers la porte Nord, il a la forme d’un passage couvert à quatre portes qui a été largement restauré.
Le sanctuaire des Nymphes
Marcher sur les pavés du cardo maximus, c’est marcher dans les ornières laissées par les chars et les charriots qui l’ont emprunté durant de longs siècles. C’est aussi découvrir des trésors antiques. Ainsi le marché ou macellum au sol couvert de mosaïque. En son centre un octogone où l’on changeait l’argent. Surtout ne pas manquer les lions soutenant un banc. C’est là que la marchandise était exposée. Autre merveille, le Nymphée, un sanctuaire sur deux étages coiffé d’un demi-dôme dédié aux nymphes de l’eau. C’est sans doute un des bâtiments les mieux conservés de l’ancienne Gerasa. Un système incroyable de canalisation amenait l’eau jusqu’aux fontaines du temple.
Le temple d’Artémis
Enfin, voici les restes du grand temple d’Artémis, la déesse de la chasse. C’était un des bâtiments les plus imposants de la ville : 160 m par 120 m pour ses murs d’enceintes et des colonnes hautes de 13 mètres. Les Arabes l’ont transformé un temps en forteresse. La cella (la partie close du temple) mesurait 23 m par 40 m ! Jerash abrite, outre des vestiges païens, de nombreuses ruines d’églises (la ville en comptait treize et disposait aussi d’une cathédrale, Saint-Théodore) datant de l’empereur byzantin Justinien (VIe siècle). Les traces d’une synagogue ont aussi été découvertes. Surtout, n’hésitez pas à consacrer du temps à Jerash.
Jour 2, road trip d’Amman à la mer Morte
Du temps, il en faut aussi pour prendre le pouls d’Amman. Car Amman a plusieurs visages. Moderne, avec ses immeubles superbes. Moyen-oriental à al-Balad, sa ville basse refuge des pauvres et des petits marchands. Historique avec, entre autres, son théâtre antique et sa forteresse dominant la cité. Edifié au sommet du djebel al-Qalaa, cette citadelle offre un coup d’œil sans pareil sur la capitale jordanienne, notamment sur le théâtre romain et la mosquée Abu Darwish. Au loin, on peut aussi distinguer un gigantesque drapeau jordanien (60 par 30 mètres) flottant au sommet d’un mat de 127 m de hauteur.
Une citadelle millénaire
Au cours de son histoire multimillénaire, la citadelle a été occupée par les Ammonites qui construisirent des fortifications, les Assyriens, les Babyloniens, les Perses, les Grecs, les Romains et, enfin, les Arabes musulmans. Au cœur de la citadelle, il convient de visiter prioritairement le temple d’Hercule, les vestiges d’une mosquée omeyyade et d’une église byzantine ainsi que le palais omeyyade, un ensemble complexe de bâtiments édifiés sous cette dynastie arabe. Un petit musée au lustre passé vient utilement compléter la visite. A ses pieds, gisent les restes d’une statue gigantesque d’Hercule : doigts, coude et… sexe de ce héros immortel.
Le théâtre romain
Avant de quitter Amman, une visite, même rapide, au théâtre romain aperçu depuis la citadelle s’impose. Bâti au IIe siècle et creusé dans la colline, bordé par l’ancien forum, il pouvait accueillir 6 000 spectateurs (c’est le plus grand de Jordanie) répartis en trois étages : en bas, les personnalités, au milieu les gens aisés, en haut le peuple qui entrait et sortait par des passages emménagés à son sommet. Sur les deux côtés de la scène ont été installés deux musées : le musée du folklore et celui des traditions populaires de Jordanie. Retour à la voiture. Les 32 kilomètres séparant Amman de Madaba, troisième étape du road trip, sont vite avalés.
Une carte pour les road trips du VIè siècle
Madaba est une ville moyenne (86 000 habitants) aux rues centrales bordées de boutiques de souvenirs, de restaurants et d’hôtels. Citée dans la Bible, cette cité au sud d’Amman, se trouve sur la route des Rois menant vers Kerak et Pétra. Elle est surtout connue pour ses mosaïques byzantines et omeyyades, dont la célèbre « carte de Madaba » que l’église Saint-Georges abrite depuis le VIe siècle. Constitué à l’origine de plus de deux millions de tesselles, cette mosaïque est la plus ancienne représentation cartographique de la Terre sainte connue à ce jour. On peut y distinguer Jérusalem et les villes de la Décapole parmi les 156 villes et villages nommés sur cette carte qui va du Liban au delta du Nil et de la Méditerranée aux déserts d’Arabie. Il y a 1 500 ans, les pèlerins s’en servaient pour s’orienter.
Le mont Nebo
Quatrième étape de notre Road trip, le mont Nebo à une dizaine de kilomètre de Madaba d’où on peut apercevoir Amman, la mer Morte, Jéricho et Jérusalem. D’abord de la plaine, ensuite des lacets et enfin le sommet du mont dont l’aménagement et la gestion ont été confiés aux franciscains par le roi Abdullah 1er. C’est du mont Nebo, sur lequel se sont rendus les papes Jean Paul II en 2000 et Benoît XVI en 2009, que Moïse a aperçu la Terre promise, au terme du long exode du peuple juif fuyant Pharaon. C’est aussi là que le prophète aurait fait couler l’eau d’un rocher pour étancher la soif des Hébreux (à l’époque byzantine, les malades venaient ici pour prendre ces eaux dans l’espoir de se soigner). Pourtant, Moïse, 120 ans selon la Bible, ne rejoindra jamais le pays de Canaan. Il y est mort.
A savoir
A ce jour, sa tombe, qui pourrait aussi être dans le désert, n’a toujours pas été découverte. Marcher sur le mont Nébo ou Moab, son nom biblique, c’est marcher dans l’histoire de l’Histoire. Un sentiment étonnant.
Flotter sans bouger
Le mont Nébo (817 m d’altitude) est séparé de la Terre promise par un fleuve, le Jourdain, et une mer sous le niveau de la mer : la célèbre mer Morte à -430 m. Soit le point le plus bas de la Terre. Rien n’y vit. Ni poissons, ni algues. Rien sauf des bactéries et des champignons. C’est une mer quasi stérile, donc, que se partagent la Jordanie et Israël. Pourtant, ce, en fait, grand lac de quelque 600 kilomètres carrés présente des particularités étonnantes. Du fait de sa salinité extrêmement élevée (34,2 % de sel contre 3,5 % pour la Méditerranée), on y flotte sans effort. Ensuite sa boue noire riche en minéraux est bénéfique pour la peau. Elle est utilisée dans les spas qui bordent ses rives. Pour autant, mieux vaut vite se rincer avec de l’eau douce après son bain. Et éviter de boire la tasse. L’eau est très salée…
Plus d’infos
Comment s’y rendre ?
On peut trouver actuellement des vols sur Ryanair à 14,99 € au départ de Marseille en fonction des dates.
Quelles formalités ?
Un visa est nécessaire pour les Européens. D’un montant de 40 dinars jordaniens (un peu plus de 50 €) il peut se faire en ligne https://eservices.moi.gov.jo/MOI_EVISA/ où à l’arrivée sur place. Attention, il doit alors être réglé en devises locales. On peut en obtenir dans le hall de débarquement de l’aéroport d’Amman. A noter que les voyageurs entrant en Jordanie par Aqaba, sur la mer Rouge, sont exempté de visa. De même, les voyageurs qui achètent un Jordan Pass jordanpass.jo donnant droit à la visite de quarante sites, dont Pétra. Une taxe de sortie du territoire est également demandée : 8 JOD (10 €) par la route, 15 JOD (19€) par les airs.
Où se loger ?
A Amman, l’hôtel Bristol (5 étoiles)
Il est situé un peu loin du centre offre une piscine intérieure. On peut dîner sur place. Il offre un beau petit-dejeûner. https://www.bristolamman.com/fr/
Au bord de la mer Morte, au Hilton Hotel Dead Sea
Cet hôtel isolé bâti à flan de collines propose plusieurs piscines, plusieurs restaurants de grande qualité, un spa, un centre de congrès et un accès direct à la mer Morte. Baignade sous surveillance, boue noire à volonté et possibilité de se rincer immédiatement après le bain. https://www.hilton.com/en/hotels/ammdshi-hilton-dead-sea-resort-and-spa/
Où se régaler lors de votre Road trip ?
A Amman, au Tawaheen al-Hawa
Ce restaurant jordano-libanais typique propose une gigantesque terrasse et une carte plus vaste encore de mezze, de mansaf, de barbecue. Au menu des légumes frais, des kubas (beignet à la viande et aux noix) , des sambusacs (beignets au fromage ou aux légumes, du bagdonitsia (pâte de sésame, huile d’olive et persil), des salades de crudités, des petites saucisses, du poulet, de l’houmous. Puis arrive le plat principal, énorme : le mansaf (riz et viande d’agneau cuite dans du lait caillé… Suivent ensuite les desserts : de délicieuses pâtisseries locale au miel accompagnées de petites crèmes parfumées. www.tawaheenalhawa.com.jo
A Madaba
Le restaurant Adonis, à proximité de l’église grecque, offre un bon compromis entre la qualité du service et celle de la nourriture proposée : des plats réellement goûteux, notamment la viande. adonisrestaurantandcafe@gmail.com
D’autres adresses de restaurants et d’hôtel figureront dans notre deuxième article.
Où acheter des souvenirs ?
Ce ne sont pas les boutiques de souvenirs qui manquent sur et autour des sites touristiques de Jordanie. En dehors des boutiques, surtout ne pas hésiter à marchander. Les prix peuvent passer du triple (voire plus) au simple.
Où se renseigner sur la Jordanie pour un Road trip réussi ?
En France, Office du tourisme de la Jordanie, 1 bis ,rue Blanche. 75009 Paris. Tél. 01 53 25 03 54. www.visitjordan.com
A Amman au Jordan Tourist Board, 10 Tunis Street, entre le 4e et le 5e cercle. Tél. : 00 962 6567 8444
A lire prochainement la deuxième partie de notre reportage « Road trip historique en Jordanie » : Pétra, le Wadi Rum et les châteaux du désert (2/2)
Photos Frédéric Cheutin
A lire aussi sur le Site Dynamic Seniors : https://dynamic-seniors.eu/le-pays-des-ecrins-vacances-dhiver/
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